Faire face aux défis liés à la distribution d'une haute tension analogique grâce à une approche d'auto-élévation

Par Bonnie Baker

Avec la contribution de Rédacteurs nord-américains de DigiKey

Fournir les centaines de volts analogiques souvent nécessaires aux équipements de test automatisés ou aux systèmes de commande de précision constitue un défi unique en son genre. Les amplificateurs opérationnels traditionnels ne peuvent pas prendre en charge les excursions de tension de sortie élevées, tandis que les alternatives avec amplificateur discret nécessitent d'importantes modifications et utilisent davantage d'espace sur la carte à circuit imprimé.

Cependant, il existe une autre option : réaliser l'auto-élévation d'un amplificateur opérationnel de sortie rail-à-rail haute tension et de deux FET capables de supporter des tensions de claquage élevées.

Cet article décrit les problèmes posés par les hautes tensions analogiques et les moyens courants de les résoudre. Il explique ensuite comment utiliser une approche d'auto-élévation à l'aide d'un amplificateur de précision haute tension d'Analog Devices et de MOSFET haute tension de Microchip Technology et Infineon Technologies.

Ces composants permettent de créer une solution hautes performances de précision qui offre une plage nominale de signaux deux fois plus étendue que celle de l'amplificateur tout en continuant de fournir des performances supérieures en utilisant un espace carte minimal.

Options de conception pour hautes tensions analogiques

Certaines applications nécessitent des excursions de tension de sortie plus élevées que ce que les amplificateurs opérationnels monolithiques haute tension standard peuvent générer. Une conception d'amplificateur avec des transistors discrets est une manière d'atteindre de vastes excursions de tension. Cette approche de conception offre la flexibilité de pouvoir personnaliser l'amplificateur pour l'application spécifique concernée. Toutefois, les conceptions avec transistors discrets utilisent davantage de composants et augmentent le temps et les efforts nécessaires au concepteur. Il est également difficile d'atteindre la précision dans des conceptions discrètes en raison de l'adaptation des dispositifs et des gradients de température.

Le module d'amplificateur opérationnel haute tension est une alternative à l'amplificateur haute tension discret. Ces modules simplifient considérablement les tâches du concepteur. Un module haute tension est souvent un module hybride qui permet à la fois un fonctionnement haute tension et haute puissance. L'avantage de ces modules par rapport aux conceptions discrètes est qu'ils offrent des performances qui sont spécifiées en usine. Ces spécifications réduisent les activités de caractérisation nécessaires de la part du concepteur, mais ces modules hybrides coûtent cher. Dans la plupart des cas, les amplificateurs opérationnels monolithiques haute tension peuvent répondre à la majeure partie des exigences de performances d'une conception.

Cependant, dans les cas où ils s'avèrent insuffisants, l'auto-élévation de l'alimentation de l'amplificateur opérationnel monolithique permet de bénéficier de diverses options d'amplificateur opérationnel. En étendant l'alimentation de l'amplificateur monolithique au-delà de sa spécification, on passe même de quelques solutions disponibles à plusieurs centaines. Bien que les stratégies d'auto-élévation nécessitent davantage d'efforts, elles sont beaucoup moins onéreuses que les modules haute tension. Ce coût moins élevé est dû en majeure partie à l'existence de divers amplificateurs opérationnels monolithiques dont les performances spécifiées en usine sont suffisantes. Notez que l'auto-élévation n'affecte pas les spécifications CC de l'amplificateur, comme le décalage de tension, l'excursion de tension d'entrée et l'excursion de tension de sortie.

Techniques d'auto-élévation de l'alimentation

La configuration avec auto-élévation contrôle les tensions d'alimentation du dispositif par rapport à sa tension de sortie. Le circuit auto-élévateur comporte une paire de transistors discrets et un réseau de polarisation résistif.

Schéma simplifié de l'auto-élévation de suivi haute tension pour le dispositif ADHV4702-1 d'Analog DevicesFigure 1 : Schéma simplifié de l'auto-élévation de suivi haute tension avec des tensions d'alimentation système +VS et -VS fixes. Les tensions d'alimentation du dispositif VCC et VEE varient en fonction de la tension de sortie VOUT. (Source de l'image : Bonnie Baker, d'après un document fourni par Analog Devices)

De nombreux amplificateurs haute tension éliminent le recours à une alimentation avec auto-élévation. Par exemple, l'ADHV4702-1BCPZ de 10 mégahertz (MHz) d'Analog Devices illustré dans la Figure est une alimentation de ±110 V suffisante pour la plupart des applications haute tension. Cependant, si le système nécessite des tensions plus élevées, l'approche à auto-élévation permet facilement de doubler la plage de fonctionnement du circuit.

Pour réaliser cette auto-élévation, le MOSFET à canal N IRFP4868PBF d'Infineon Technologies est utilisé en tant que Q1. Ce dispositif présente une tension de claquage de 300 V et une valeur ID maximale de 70 A. Quant à Q2, il s'agit du MOSFET à canal P TP2435N8-G de Microchip Technology. Celui-ci présente une tension de claquage de 350 V.

À la Figure 1, l'amplificateur de précision ADHV4702-1 a une plage de tensions d'alimentation en fonctionnement de ±12 V à ±110 V. Avec une tension d'alimentation de ±110 V, la tension de sortie typique est de ±108,5 V. Avec ±VS à ±300 V, ce circuit auto-élévateur constitue la base d'un amplificateur pouvant atteindre une excursion de sortie de ±120 V ou plus.

Ce concept d'auto-élévation, également appelé « rails mobiles », ajuste en permanence les tensions d'alimentation de l'amplificateur afin qu'elles soient réparties de manière symétrique autour de la tension de sortie VOUT de l'amplificateur. Par conséquent, la sortie reste dans la plage d'alimentation. Dans le circuit auto-élévateur de suivi, les diviseurs de tension à résistances (RBOT et RTOP) maintiennent un écart constant de ±90 V entre VCC et VEE, tandis que la plage de sortie de l'amplificateur est de ±200 V. Une simulation Spice illustre ce phénomène d'alimentation flottante (Figure 2).

Graphique d'une simulation Spice illustrant le phénomène d'alimentation flottanteFigure 2 : Une simulation Spice montre le phénomène d'alimentation flottante, où l'alimentation delta de l'amplificateur (écart entre VCC et VEE) reste à ±90 V environ, tandis que la plage de sortie de l'amplificateur est de ±200 V. (Source de l'image : Bonnie Baker)

À la Figure 2, la valeur VOUT est égale à la valeur VIN, RTOP équivaut à 45 kilo-ohms (kΩ) et RBOT équivaut à 20 kΩ. RTOP est la résistance la plus proche des alimentations externes (+VS et -VS), tandis que RBOT est la résistance la plus proche de la sortie de l'amplificateur opérationnel (VOUT). Notez qu'à la Figure 2, les tensions VCC et VEE se rapprochent de +VS (300 V) et de -VS (-300 V). Une distorsion du circuit se produit lorsque le signal de sortie (VOUT) force VCC et VEE à être égales ou supérieures à +VS ou -VS.

L'auto-élévation offre une capacité de signal élevé pour tous les amplificateurs opérationnels. Toutefois, la vitesse de balayage de l'amplificateur a une incidence sur les performances dynamiques de cette configuration haute tension. À la Figure 1, la vitesse de balayage de l'amplificateur opérationnel limite la capacité de réponse de VCC et VEE à un signal dynamique. Les amplificateurs auto-élévateurs sont plus adaptés aux applications CC basse fréquence où les alimentations varient lentement.

Implémentation d'une conception auto-élévatrice

La conception auto-élévatrice de l'alimentation d'un amplificateur opérationnel suit un processus en trois étapes :

  1. Évaluation du compromis entre la dissipation de puissance au niveau de l'amplificateur et au niveau des MOSFET
  2. Définition de l'excursion de sortie maximale de l'amplificateur et attribution de la tension d'alimentation de l'amplificateur
  3. Prise en compte des exigences de puissance des résistances

À la Figure 1, la dissipation de puissance est répartie entre l'amplificateur opérationnel et le drain-source des MOSFET. L'amplificateur et les FET ont une alimentation en tension qui correspond à une plage de fonctionnement spécifiée. On peut être tenté d'alimenter l'amplificateur avec des tensions plus basses, mais cela pourrait exercer une contrainte sur les MOSFET. La dissipation de puissance totale est répartie entre l'amplificateur et les MOSFET.

La relation entre la plage d'excursion de sortie maximale de l'amplificateur opérationnel (±VOUT-MAX) et les alimentations de l'amplificateur opérationnel (VEE, VCC) détermine le réseau de diviseur de tension à résistances, conformément à l'Équation 1.

Équation 1a Équation 1a

Si la tension d'alimentation nominale de l'amplificateur opérationnel est de ±100 V et si la plage d'excursion de sortie maximale est de ±150 V, alors le rapport de diviseur équivaut à :

Équation 1b Équation 1b

Ce calcul est un moyen pratique de déterminer la valeur des résistances dans cette application. Cependant, lors de la sélection des résistances, il est important de garder à l'esprit que de hautes tensions sont impliquées et que les résistances devront peut-être dissiper beaucoup de puissance. Il convient de choisir des valeurs de résistances permettant de limiter la dissipation thermique pour leurs plages nominales respectives.

Par exemple, RTOP atteint 150 V et RBOT atteint 100 V. Avec des résistances ayant une valeur nominale de ½ W, la limite de dissipation de puissance (V2/R) est calculée à l'aide de l'Équation 2 :

Équation 2a Équation 2a

Équation 2b Équation 2b

En utilisant la résistance de 45 kΩ en tant que facteur de limitation de la dissipation de puissance, la valeur RBOT donne un diviseur de 2,5:1 avec une limite de dissipation de courant au repos calculée comme suit :

Équation 2c

Sélection des FET

Le principal élément à prendre en compte lors de la sélection des MOSFET est la tension de claquage. Cette tension doit supporter les pires conditions de polarisation. La tension de claquage entre en jeu quand la sortie est saturée, ce qui se produit lorsqu'un MOSFET se trouve à la valeur VDS maximale et que l'autre MOSFET se trouve à la valeur VDS minimale. Par exemple, la valeur VDS absolue la plus élevée est de ~300 V, ce qui correspond à VOUT-MAX (500 V) moins la tension d'alimentation totale de l'amplificateur (VCC - VEE = 200 V). Par conséquent, la tension de tenue des MOSFET doit être d'au moins 300 V. En outre, le calcul de la dissipation de puissance doit correspondre au pire scénario à la fois pour VDS et pour le courant de fonctionnement. Les concepteurs doivent s'assurer que les MOSFET sont spécifiés pour fonctionner à ce niveau de puissance.

La capacité de grille du MOSFET crée un filtre passe-bas avec les résistances de polarisation, et les MOSFET dotés d'une tension de claquage plus élevée ont tendance à avoir une capacité de grille supérieure. Dans ce circuit, les résistances de polarisation ont généralement une valeur allant de plusieurs dizaines de kΩ à plusieurs centaines de kΩ. Avec des valeurs aussi élevées, le ralentissement du circuit ne nécessite pas de grande capacité de grille.

La valeur de la capacité de grille du MOSFET indiquée dans la fiche technique (CGATE) et la combinaison parallèle de RTOP et RBOT déterminent la fréquence de pôle du filtre passe-bas, conformément à l'Équation 3 :

Équation 3 Équation 3

Précautions

La réponse en fréquences du réseau de polarisation doit toujours être dix fois plus rapide que les signaux d'entrée et de sortie. Si le réseau de polarisation ralentit le circuit, la sortie de l'amplificateur peut étendre son alimentation. L'entrée risque également d'être endommagée en raison d'excursions temporaires en dehors des rails d'alimentation de l'amplificateur, tandis que la sortie risque d'être exposée à une distorsion en raison d'une saturation temporaire ou d'une limitation du balayage. Ces conditions peuvent entraîner une perte de contre-réaction, un comportement imprévisible des transitoires et éventuellement un verrouillage à l'état passant dû à l'inversion de phase.

Performances

L'amplificateur du circuit auto-élévateur d'alimentation peut être configuré pour un gain non inverseur supérieur. Cette configuration d'amplificateur opérationnel auto-élévateur fonctionne de la même manière que celle de n'importe quel étage de gain d'amplificateur opérationnel. Il convient d'utiliser une configuration non inverseuse. Avec une mesure de linéarité CC, les caractéristiques de l'amplificateur dominent les résultats (Figure 3). L'amplificateur est configuré comme suit : gain de 20 avec une plage d'alimentation de ±140 V.

Graphique de l'erreur de gain par rapport à la tension d'entréeFigure 3 : Erreur de gain par rapport à la tension d'entrée, avec un gain de 20 et une tension d'alimentation de ±140 V. (Source de l'image : Analog Devices)

La sortie de l'amplificateur opérationnel a une vitesse de balayage finie, tandis que ses alimentations dépendent de sa sortie. Au niveau de l'entrée de l'amplificateur opérationnel, une fonction en échelon peut dépasser la plage d'alimentation de l'amplificateur opérationnel (Figure 4).

Graphique de la vitesse de balayage avec un gain de 20 et une plage d'alimentation de ±140 VFigure 4 : Vitesse de balayage avec un gain de 20 et une plage d'alimentation de ±140 V. Au niveau de l'entrée de l'amplificateur opérationnel, une fonction en échelon peut dépasser la plage d'alimentation de l'amplificateur opérationnel, ce qui peut provoquer un verrouillage. Cela peut être évité en plaçant un filtre passe-bas au niveau du nœud d'entrée. (Source de l'image : Analog Devices)

À la Figure 4, la vitesse de balayage spécifiée de l'ADHV4702-1 est de 74 V par microseconde (V/ms). Pour éviter le verrouillage, les concepteurs doivent utiliser un filtre passe-bas au niveau du nœud d'entrée du signal (VIN). Ce circuit de limitation du balayage réduit les transitoires à un niveau inférieur ou égal à la vitesse de balayage de l'amplificateur opérationnel, calculée grâce à l'Équation 4 :

Équation 4 Équation 4

Où VSTEP correspond à la taille d'échelon maximale des sources de signaux et SR correspond à la vitesse de balayage de l'amplificateur opérationnel.

Conclusion

Une excellente manière de générer de hautes tensions analogiques à faible coût et en utilisant le moins d'espace carte possible consiste à réaliser l'auto-élévation d'un amplificateur opérationnel de sortie rail-à-rail haute tension et de deux transistors capables de supporter des tensions de claquage élevées. L'amplificateur de précision haute tension ADHV4702-1 d'Analog Devices et les MOSFET haute tension d'Infineon et de Microchip permettent de créer une solution de précision hautes performances de ce type, doublant ainsi la plage nominale de signaux de l'amplificateur tout en continuant à fournir des performances supérieures.

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À propos de l'auteur

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Bonnie Baker

Bonnie Baker est ingénieure en électronique et une professionnelle chevronnée en conception analogique, chaînes de signaux et signaux mixtes. Elle a rédigé et publié des centaines d'articles techniques, de rubriques EDN et de descriptions de produits dans des publications industrielles. Tout en écrivant « A Baker's Dozen: Real Analog Solutions for Digital Designers » et en co-signant plusieurs autres livres, elle a travaillé comme ingénieur de conception, de modélisation et de marketing stratégique chez Burr-Brown, Microchip Technology, Texas Instruments et Maxim Integrated. Bonnie Baker est titulaire d'un master en génie électrique de l'Université de l'Arizona, à Tucson, et d'une licence en éducation musicale de la Northern Arizona University (Flagstaff, Arizona). Elle a organisé, rédigé et présenté des cours en ligne sur divers sujets techniques, notamment sur les CAN, les CNA, les amplificateurs opérationnels, les amplificateurs de mesure, et la modélisation SPICE et IBIS.

À propos de l'éditeur

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